Provence-Alpes-Côte-d'Azur
Claire Lombard et Estelle Billet
Fondatrices de La Maison des Nines, Marseille

Travailler pour une cause qui a de l’impact est l’essence de notre projet

Portrait complet de Claire Lombard et Estelle Billet

  Provence-Alpes-Côte-d'Azur
Claire Lombard et Estelle Billet
Fondatrices de La Maison des NinesMarseille

Travailler pour une cause qui a de l’impact est l’essence de notre projet

Fondatrice de la « Maison des Nines » à Marseille et lauréates régionales du trophée Talent des Cités en 2020.

 

Travailler pour une cause qui a de l’impact est l’essence de notre projet.

 

Claire et Estelle ont ouvert la « Maison des Nines » en plein cœur de Marseille depuis juin 2021. Les « nines » signifient les jeunes femmes en provençal. Bien plus qu’un café-cantine, ce concept store est un lieu intergénérationnel qu’elles ont construit main dans la main.

 

Avant d’échanger sur votre projet, parlez-moi de votre parcours professionnel. 

 

Estelle : Je viens du monde du marketing. J’ai fait une école de commerce à Marseille et j’ai ensuite œuvré dans le monde du parfum à Paris pendant environ 7 ans. J’ai travaillé pour des maisons françaises de luxe telles que Dior, Chanel ou encore Nina Ricci. Ces expériences m’ont donné envie de me spécialiser dans la parfumerie de niche, les parfumeries de créateurs indépendants, comme Diptyque et Nose, un concept store. J’ai quitté la capitale pour revenir sur la terre de mes racines et j’ai monté un premier projet sur Marseille, une parfumerie éphémère qui s’appelait « L’instant ». Un deuxième concept store a vu le jour. Ce projet a duré un an et il m’a permis de rencontrer Claire. Après avoir fait connaissance, nous avons travaillé ensemble pendant plus d’un an avec une troisième collaboratrice pour fonder la « Maison des Nines ».

Claire : Pour ma part, je viens du monde de la presse et de la finance. J’ai fait 3 ans de presse et une petite dizaine d’années dans la finance de marché à Londres. À cause du Brexit, j’ai été envoyé à Francfort (Allemagne). C’est à ce moment-là que j’ai voulu sortir de ma bulle et j’ai décidé de rentrer en France, mais ailleurs qu’à Paris. J’ai posé mes valises à Marseille en me disant que je trouverais forcément un projet qui allait me plaire. C’est ce qui s’est passé quand j’ai rencontré Estelle dans l’un de ses concept stores. J’ai toujours été attiré par la Food et ce milieu. On a donc réfléchi à un lieu qui combinerait plusieurs aspects de convivialité et de partage et qui permettrait de réunir les deux mondes qui nous intéressaient : le parfum et la sélection de marques engagées.

 

Avez-vous toujours eu envie de créer votre entreprise ?

 

Estelle : Personnellement, j’ai fait un travail pendant un an avec une coach pour arriver à cette conclusion. J’ai eu du mal à comprendre que le monde de l’entreprise n’était pas forcément fait pour moi. J’ai toujours eu envie d’entreprendre au fond de moi, mais je ne pensais pas le faire si tôt dans ma carrière. Je me voyais travailler à plein de postes différents dans des entreprises importantes, mais la vie en a décidé autrement. Ce sont des rencontres et en particulier celle de Claire qui ont tout changé.

Claire : De mon côté, c’est plus un concours de circonstances. J’ai toujours eu une démarche et une façon de travailler très entrepreneuriale et proactive sans m’en rendre vraiment compte. Du coup, cela m’a beaucoup servi quand on a commencé à travailler ensemble sur le projet. J’ai fait une école de commerce en 2012 et personne ne m’a sensibilisé sur le sujet d’entreprendre.

 

Est-ce simple de gérer un projet à deux ? 

 

Estelle : On ne se connaissait pas forcément beaucoup au début, mais on a passé tellement de temps ensemble, 7 j/7 depuis bientôt 3 ans, donc on se connait plus que d’autres personnes. Nos profils sont très complémentaires. On se soutient et on avance ensemble depuis le début. C’est dur, car le rythme de travail est intense, mais nos profils font que c’est assez naturel.

Claire : Travailler à deux ou à plusieurs, c’est une force et une faiblesse. Après, effectivement, nos profils sont très complémentaires. Je vais être assez rationnelle sur les chiffres et je prends des décisions rapidement tandis qu’Estelle va être plus sur la création et la communication. On se questionne ensemble sur notre avenir. Nous avons une stratégie et une envie de savoir où nous allons. C’est très important de la conserver et de toujours se poser la question ensemble.

 

Pouvez-vous parler un peu du projet de la « Maison des Nines » ? 

 

Estelle : La « Maison des Nines » était au départ une boulangerie fermée depuis 10 ans dans un quartier historique du centre-ville qui s’appelle Noailles. C’est un endroit que nous avons rénové pendant 1 an pour en faire un lieu de vie avec 3 activités :

– Une partie café-cantine, ouverte le midi avec des produits de saison et locaux. Nous avons une cheffe d’origine kabyle libanaise. La cuisine est donc française avec des twists de culture. Le mélange est différent et intéressant chaque semaine.

– Une partie shop avec une trentaine de marques, françaises pour la plupart, et qui sont engagées en étant écoresponsables. Elles vendent du parfum, du prêt à porter homme et femme et des bijoux.

– Une activité événementielle sur le lieu avec des privatisations, des dîners de chefs, des expositions d’artistes qui changent tous les mois ou tous les 2 mois. Une partie se fait à l’extérieur avec un service de traiteur indépendant qui s’appelle « Nines hors les murs ». Nous travaillons autant pour des particuliers avec des dîners de 10 personnes qu’avec des festivals de 10 000 personnes.

 

Comment avez-vous choisi le lieu ?

 

Claire : Nous avons eu de la chance de trouver très rapidement. Après, beaucoup de personnes pensent, sans avoir vu leur concept, qu’il faut que tout soit très compartimenté. Mais, en réalité, il y a surtout une question au niveau des odeurs, mais passer d’un espace à un autre fonctionne très bien sans se poser la question. C’est assez fluide. Les clients viennent plus chercher une façon de vivre, découvrir quelque chose. Nous avons un calendrier d’entrée au shop avec une nouvelle marque qui s’installe par mois. Les produits sont en toute petite quantité pour favoriser le renouvellement. Nous avons eu de la chance de trouver ce local, car c’était un quartier qui nous parlait énormément. C’est un quartier joyeux, très mixte, avec plein d’odeurs, dans l’un des quartiers historiques qu’on appelle « le ventre de Marseille » donc tout cela voulait dire quelque chose pour nous. Malgré tout, aujourd’hui, je pense que le concept aurait pu fonctionner dans plein de lieux différents.

 

Est-ce que vous vous êtes faites aider pour que le projet voit le jour ? 

 

Claire : Comme c’était la période du Covid, nous avons eu plus de temps. Nous nous sommes faites accompagner dans un premier temps par la BGE, un réseau national associatif qui soutient la création d’entreprise. Estelle était déjà incubée dans l’incubateur de Kedge et c’est la BGE qui nous a poussés vers le concours « Talents des cités » que nous avons gagné au niveau de la région. Cela a été un déclencheur dans la façon dont nous avons préparé l’ouverture. Les moments de jury, la remise du dossier… étaient des instants clé pour nous faire réfléchir sur ce que nous voulions vraiment, la raison d’être de notre projet et les valeurs que nous avions à cœur de transmettre. Par la même occasion, cela a renforcé nos liens.

Suite à « Talents des cités », nous avons été incubées à La Ruche avec le programme des audacieuses et avec « Quartier café » qui est un programme d’incubation porté par le Groupe SOS qui soutient les commerces de proximité et l’inclusion.

 

L’impact environnemental a toujours été une valeur importante pour vous ? 

 

Estelle : Depuis le début, nous avons eu la volonté d’avoir un impact dans notre activité. Dans la food, nous voulions avoir un réel impact au niveau des menus avec des produits de saison de producteurs locaux ainsi que travailler avec un menu à la semaine avec une carte courte. Côté shop, nous avions deux idées :

– Mettre en avant de jeunes designers dont c’est la première collection. C’est top de pouvoir être partenaires de leur lancement.

– Avoir un impact éco responsable avec des marques qui produisent en France ou qui travaillent sur des matières éco responsables comme le lin et/ou coton bio.

 

Quels sont vos projets ? 

 

Claire : Nous avons toujours plein de projets. Nous avons connu une phase de restructuration, car nous étions 3 associées à la base et nous ne sommes plus que 2 depuis janvier. En plus, je suis enceinte donc nous avons monté une équipe sur le lieu qui porte les mêmes messages que nous. Nous les avons formés et nous les avons accompagnés pour qu’ils diffusent les mêmes valeurs que nous. Nous sommes persuadées qu’il y a une croissance possible à l’intérieur du lieu avec plus d’événements et une croissance de la partie boutique. D’ailleurs, nous avons décidé d’investir dans l’aménagement de la boutique pour accompagner son positionnement.

À l’extérieur du lieu, nous avons 2 axes principaux à développer : le service traiteur et l’ouverture d’un second lieu. On s’est rendu compte que le développement est à la fois une combinaison de ce que nous voulons faire, mais également ce que les client·es nous demandent de faire.

 

Le mot de la fin ? 

Tout ce qu’on a vécu a été fort et le chemin que nous avons emprunté est intéressant.

 

Nous sommes passionnées par le challenge, donc les projets fusent. Entreprendre au féminin est un message que nous portons naturellement.

 

Nous ne souhaitons pas communiquer particulièrement sur ce message. Pour nous, les actions prouvent beaucoup plus que la parole. Nous voulons porter le message qu’il est important de faire quelque chose qui a du sens.

Nous sommes persuadées qu’il y a un écosystème qui peut se créer dans la région autour d’entreprises qui fonctionnent ou qui se lancent. Même les entreprises qui ne fonctionnent pas, c’est important d’en parler. C’est comme cela qu’on aura moins peur d’entreprendre. On a le droit de changer de métier. Ces messages sont hyper importants à porter.


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Un portrait rédigé par Eva Thimmonier
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